Par Marie-Christine pour Carré Or TV
Une merveille !
Catherine Aymerie interprète actuellement au Théâtre Essaion « Le chef d’œuvre inconnu » d’Honoré de Balzac publié en 1831. Cette comédienne de talent nous conte la rencontre imaginée par Balzac entre trois peintres : Franz Porbus célèbre peintre de l’époque, auteur du portrait de Marie de Médicis
sous les traits de « Marie l’Égyptienne ». Nicolas Poussin, jeune, miséreux et encore inconnu du grand public. Et le grand « Maître Frenhofer » personnage imaginé par l’auteur.
L’action se situe au 17ème siècle, rue des Grands Augustins à Paris.
Poussin encore très jeune souhaite rencontrer Porbus et découvrir son atelier et ses œuvres. Par le plus grand des hasards, il suit un vieil homme à l’allure imposante se rendant justement chez Porbus et débarque ainsi chez ce dernier où il assiste alors à une scène incroyable.
Allant ça et là dans l’atelier du peintre, le dit vieillard se plante devant le tableau de « Marie l’Égyptienne » et critique très sévèrement le portrait, s’autorisant même à prendre des pinceaux et à réaliser des retouches ! Le tableau se métamorphose littéralement sous l’œil ébahi du jeune Poussin néophyte et de son auteur Porbus !
Puis Déclare devant ce même portrait : « Elle est collée au fond de la toile, il faut que ce beau corps soit animé́ par le souffle de la vie ». Pourquoi imitez-vous Titien, Veronèse, Durer ?
Ce vieillard n’est d’autre que le célèbre Maître Frenhofer. Ce dernier semble posséder les secrets du grand Art. Ses conceptions sur la peinture sont totalement novatrices. Déclarant haut et fort que « la ligne n’existe pas dans la nature, que tout est plein et c’est en modelant qu’on dessine. »
Il invite Poussin et Perbus à se rendre chez lui pour festoyer et parler peinture. Ces derniers vont ainsi prendre un véritable cours car lui seul a reçu de son Maître, le Grand Mabuse le secret du relief et bien plus encore ! Sans émotion, sans ressenti la peinture n’est rien !
« Le génie fantasque vit dans une sphère inconnue », de nombreuses ébauches, toiles font l’admiration de Poussin et de Porbus, mais pour le peintre, elles n’ont aucune valeur, ce ne sont que des études préparatoires pour l’Œuvre entrepris depuis fort longtemps et inachevée.
Maître Frenhofer travaille effectivement depuis 10 ans sur le portrait la « belle Noiseuse ». Il en est amoureux et la cache jalousement, nul n’a le droit de voir ou entrevoir son trésor. N’ayant pas encore atteint la perfection et recherchant le modèle idéal, Maître Frenhofer ne peut poser la touche finale. Mais existe-t-il vraiment un modèle sur terre possédant la perfection ? Est-il de ce monde ? Gilette, l’amoureuse de Poussin est-elle ce diamant pur recherché par le Grand Maître ?
Catherine Aymerie nous entraine dans l’univers de ces peintres, elle sait nous tenir en haleine durant 70 minutes et donne vie littéralement aux tableaux.
Cette nouvelle de Balzac est en soi un véritable cours sur l’art. La technique, le trait, le dessin ne sont pas essentiels, le peintre doit faire naitre l’émotion faire vivre son tableau.
Comme Pousssin et Porbus, nous percevons les formes et les couleurs.
Maître Frenhofer prétend : « La mission de l’art n’est pas de copier la nature, mais de l’exprimer », « Saisir l’âme ».
Avec Catherine Aymerie nous pénétrons dans le monde fantasque de ce génie de la peinture. Cette nouvelle de Balzac qui sera intégrée dans La Comédie Humaine a inspiré́ Jacques Rivette avec son film en 1991 « la Belle Noiseuse ».
On prétend également que Picasso a été touché par « Le chef d’œuvre inconnu ». Il n’est certainement pas le seul peintre et amoureux de la peinture a recherché comme le dit si bien Balzac : « Savoir saisir l’âme ».
Merci Catherine Aymerie et Michel Favart qui a réalisé́ une mise en scène très sobre mettant en lumière l’écriture élégante de cette nouvelle toujours d’actualité́.