Les entretiens d’embauche au Soum-Soum

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Distribution :

En alternance : Mathias Sénié, Emilie Lecouvey, Eugénie De Bohent, Mathieu Mocquant

A l’affiche : 

Jusqu’au 25 juin 2017

Lieu : 

Le Soum-Soum

36, rue Dalayrac

75002 PARIS

Comparez les prix : 

Par Ingmar Bergmann pour Carré Or TV

La société malade du travail.

 

Dans le minuscule théâtre du Soum-Soum, on boit un verre avec ses amis en regardant vers la petite estrade, sur laquelle une joyeuse équipe de jeunes comédiens nous offre une série d’entretiens d’embauche, qui constituent une série d’autant de duos qui sont tous plus inattendus, surprenants et saisissants les uns que les autres.

On pense tout connaître de ces conversations à deux, durant lesquelles on doit prendre sur soi et jouer un rôle convaincant car on sait qu’en cet instant précis, se décide notre subsistance des prochaines années dans une société qui fera peut-être bientôt de la précarité un art-de-vivre ; pourtant, chaque milieu professionnel a ses propres règles et, si nous l’avions oublié, ce spectacle nous rappelle que, hormis leur intransigeante mécanique, il n’y a pas deux entretiens d’embauche qui se ressemblent, tant la diversité des activités, des expériences personnelles, des âges ou des sexes est grande, se combinant de telle sorte que l’éventail finalement obtenu, est parfaitement infini.

Lors de ces conversations à deux, chacun feint de s’intéresser à l’autre ; volontairement ou non, et avec plus ou moins d’habileté, chacun feint d’être comme l’autre pense qu’il est ou, plutôt : chacun feint d’être conforme à ce qu’il pense que l’autre pense ou doit absolument penser de lui. L’art de l’entretien d’embauche est l’art d’être caméléon sans le montrer et, si l’on n’est pas capable de souplesse, on a perdu d’avance.

Le spectateur est parfois prit à parti

 

Dans ce spectacle, aux moyens sans prétention, la virtuosité des interprètes que sont Emilie Lecouvey, en alternance avec Eugénie de Bohent, et Mathias Sénié, est extrêmement communicative et, avec le soutien des spectateurs, qu’ils n’hésitent pas à prendre à parti et à faire participer aussi, on est immédiatement conduit à constater, avec et par eux, à quel point le monde de l’emploi est devenu proche de l’absurde.

C’est ainsi que ce qui passe, tout d’abord, pour une série de sketchs désopilants, devient bientôt une critique aiguë de l’impasse dans laquelle se trouvent tous ceux qui, de nos jours, sont obligés de jouer un rôle dans cette comédie sans rire qu’on appelle « la recherche d’emploi », parmi lesquels vous vous reconnaîtrez certainement, ou certains de vos proches.

Sans déflorer trop l’issue de ce spectacle qui a tout de la critique sociale, on comprend assez vite que l’emploi n’est pas fait pour celui qui a besoin de travailler, mais pour celui qui a besoin de faire travailler les autres aux fins de sa propre prospérité.

À l’époque où les machines ont des aptitudes qu’on privilégie sur celles des humains, puisque le travail n’est plus accessible à l’humain, qu’attend-on pour prendre acte du fait que le travail n’est plus, ne peut plus être l’élément de base qui fonde l’harmonie sociale ?

C’est l’une des questions que l’on peut se poser, à l’issue de la représentation de ce spectacle.

Pour toutes ces raisons, et alors même qu’il nous rappelle les difficultés dans lesquelles nous force à évoluer notre siècle, ce spectacle fait du bien au moral des spectateurs car il leur permet de prendre du recul à l’endroit de leur propre situation de travailleurs, aspirant à le devenir ou à le rester et, lorsqu’ils sont de ceux qui n’ont pas besoin qu’on les aide à considérer leur propre situation avec distance, ils seront rassérénés de constater qu’un jeune auteur et une poignée de jeunes acteurs, mettent, pour eux et avec une virtuosité dépourvue de prétention, des mots sur le ressenti qu’ils en ont peut-être.

Sans oublier que l’on rit beaucoup, car toutes ces considérations sont, dans ce spectacle singulier, abordées avec profondeur, finesse mais aussi légèreté. On regrette que le spectacle ait une fin, car on voudrait voir encore abordées nombre de situations édifiantes, et on se plaît à rêver que l’auteur, Mathias Sénié qui signe aussi la mise-en-scène avec Raymond Dikoumé, et leur équipe nous gratifieront bientôt d’une suite ou d’un autre spectacle, soit sur le même thème, soit sur d’autres thèmes, mais avec le même esprit d’analyse.

Si vous n’avez pas encore eu l’occasion de les voir à Paris, profitez de l’été : il seront au Festival d’Avignon pendant le mois de juillet. Venez avec votre famille ou avec vos amis ; il n’y a pas de meilleurs sortie pour bien commencer la soirée !

3 plusieurs commentaires

  1. Un bon moment passé avec les comédiens qui se donnent à fond. L’endroit est très sympa aussi. Je vous conseille cette pièce.

  2. Original et drôle, ce spectacle sous forme de sketchs, est interprété par 2 comédiens convaincants et talentueux. On passe un très bon moment dans un lieu accueillant , je recommande!

  3. Un excellent moment. Bravo aux deux comédiens et quel courage d’avoir joué devant les 7 spectateurs que nous étions. Allez les encourager… ils le méritent !

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