Naïs au Théâtre le Lucernaire

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Par Marie-Christine pour Carré Or TV

Plein d’émotions !

 

En rédigeant sa nouvelle Nais Micoulin, Émile Zola ne pouvait pas imaginer qu’elle serait adaptée au cinéma en 1945 par Marcel Pagnol. Ce dernier a effectivement transformé cette histoire dramatique en un conte provençal.

Près de 80 ans plus tard, Arthur Cachia l’adapte pour le théâtre, assisté dans la mise en scène par Thierry Harcourt. Une fois encore, un bossu, comme dans Jean de Florette ou Manon des Sources, est interprété avec talent par Arthur Cachia, un acteur du Sud bercé par la littérature de Pagnol.

Délibérément, l’action se déroule dans les années 60-70, une période marquée par la libération sexuelle et la remise en question des barrières sociétales. La Compagnie Les Fautes de Frappe porte cette pièce empreinte de poésie, actuellement présentée au Théâtre du Lucernaire. Sous nos yeux, nous voyons s’épanouir l’amour entre Nais, une jeune paysanne, et Frédéric, un jeune homme de la bourgeoisie aixoise.

Nais et Frédéric se connaissent depuis leur tendre enfance. Présent le jour où Nais apporte à sa mère des légumes et du poisson frais pêché par son père Micoulin, Frédéric est frappé par sa beauté. Il demande alors à sa mère de passer les vacances d’été dans leur propriété proche de Marseille, entretenue par leur métayer, Micoulin, le père de Nais. Autant Nais est douce et belle, autant son père est brutal et colérique, incapable de s’exprimer autrement qu’en hurlant. Il veut à tout prix garder sa fille chez lui jusqu’à sa mort, pour qu’elle soit à son service. Aucun prétendant ne doit s’approcher de Nais, excepté Toine, bossu et donc sans danger vu son infirmité.

Toine est pourtant follement amoureux de Nais, mais il est lucide : jamais il n’osera déclarer sa flamme. C’est impossible : il est bossu ! Sa grand-mère, partie au ciel, lui racontait lorsqu’il était enfant : « Les petits bossus sont de petits anges, qui cachent leurs ailes sous leur pardessus. » Tel est le secret des bossus.

Contrairement à la nouvelle de Zola, Monsieur Frédéric n’est pas un fils débauché profitant de la jeunesse de la fille de leur métayer. Il est réellement amoureux de Nais. Micoulin, flairant le séducteur, décide de se débarrasser de lui lorsqu’il se rend compte que Nais et Frédéric s’aiment. Il envisage les scénarios les plus radicaux : noyade, balle perdue à la chasse… tout est bon pour éloigner Frédéric de Nais.

Face à ses échecs successifs pour éliminer ce prétendant, Micoulin décide de s’installer dans une cabane sur les rochers, tout près de la mer. Mais la Méditerranée est capricieuse, et une terrible tempête emporte la cabane et Micoulin ! Tout est bien qui finit bien ! Pas tout à fait. Si Micoulin ne fait plus obstacle à l’amour de ces jeunes gens, Toine, toujours protecteur, craint que Nais ne soit enceinte et laissée pour compte après les vacances. Nais est pourtant prête à accepter cette situation, par amour pour Frédéric. Elle accepte l’inacceptable : laisser Frédéric partir à Paris pour finir ses études, au risque de le perdre définitivement. Elle l’aimera toujours, et si elle porte un enfant de lui, ce sera merveilleux !

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Toine, par amour pour Nais, plaide auprès de Mme Rostaing, la mère de Frédéric, et lui apporte un bouquet de fleurs des champs. Cette dernière déclare : « On m’a donné beaucoup de fleurs dans ma vie ; celles-ci ne sont pas les plus jolies, mais ce sont certainement les plus belles. » Toine a su parler à cette femme de la ville, lui ouvrir les yeux sur la situation de Nais, et Mme Rostaing décide alors de l’emmener à Aix. Toine reste seul.

Ce personnage de Toine est bien sûr très attachant, et Arthur Cachia réussit une belle performance. Marie Wauquier, dans le rôle de Nais, est très émouvante. Elle incarne avec brio cette jeune fille pure, naïve certes, mais tellement sincère. Kevin Coquard, en Frédéric, est un jeune homme parfaitement romantique, formant avec sa partenaire un couple d’amoureux très harmonieux. Cette pièce est un conte plein d’humanité où l’amour triomphe.

Patrick Zard, avec une voix de stentor, est absolument effrayant. C’est un Micoulin acariâtre et parfaitement cruel. Quant à Lydie Tison, elle incarne Mme Rostaing, une femme bourgeoise des années soixante, portant des robes signées Françoise Berger et Yamma Tison. Clément Pellerin et Simon Gabillet alternent plusieurs personnages.

Tout au long de cette pièce, nous sommes portés par la musique de Tazio Caputo, accompagnée de la chorégraphie de Bénédicte Charpiat. Un moment de bonheur, de poésie et d’humanité qui réchauffe le cœur, dont nous avons grandement besoin par les temps qui courent ! Toute cette troupe de comédiens sera au rendez-vous cet été au Festival d’Avignon. Souhaitons-leur bonne chance.

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